
Journal d'un catholique libertaire
Qui a pris ses distances vis à vis de l'Eglise, de sa hiérarchie et de son pouvoir
« Si quelqu’un veut être le premier, qu’il soit le dernier de tous et le serviteur de tous. » (Marc 9, 35)
Lettre à Louis Bouffard
26 mai 2025

Cher Louis,
Ton témoignage m'a beaucoup boulversé et je ne suis certainement pas le seul. Je sais de quoi le parle, j'ai travaillé dans le milieu du handicap pendant une quinzaine d'années.
Dans notre monde qui confond efficacité avec valeur, autonomie avec dignité, ta parole, Louis, est une clameur prophétique. Une parole de feu et selon moi évangélique et libre.
Oui, je suis catholique, et oui, je suis libertaire. Je crois en un Dieu qui s’est fait faible, cloué, dépendant. Un Dieu qui n’a pas choisi l’euthanasie face à la Croix, mais l’offrande. Et je crois, en même temps, que personne, jamais, ne devrait être contraint d’aimer sa vie par la force… mais plutôt soutenu, entouré, aimé jusqu’à ce qu’il puisse, à nouveau, dire : « j’aime la vie ».
Ce que tu nous Louis, c’est que tu n’as pas besoin de notre pitié, ni de nos discours compassionnels qui déguisent la peur de la fragilité. Tu as besoin de notre fidélité. Tu as besoin d’une société qui ne te regarde pas comme une charge… une défaillance de nos soins… des économies à faire en abrégeant des vies… eh oui, j’ose le dire, on ne le dit pas assez… mais comme une grâce qui nous oblige à devenir plus humains, plus présents, plus fraternels..
Une société qui ne mette pas la liberté de mourir au-dessus du devoir d’aimer.
Car qu’est-ce que la liberté, sinon la possibilité de recevoir l’amour, même et surtout quand on n’a plus la force de le rendre ?
Je ne veux pas d’un monde où la solution à la souffrance… la charge qui pèse sur les famille est une simple piquouse. Je ne veux pas d’un monde où l’on propose la mort à ceux qui demandent de l’aide. Je veux un monde où les mains fragiles comptent où chaque regard posé sur une personne vulnérable est un acte de reconnaissance, où la fragilité devient un lieu de rencontre et non d’exclusion, un appel à l’amour et non un clap de fin d’un mauvais film.
Ce n’est pas une loi que nous devons voter, c’est une révolution intérieure : celle qui nous fera comprendre que la faiblesse n’est pas une honte, mais une école de tendresse.
Alors merci, Louis. Tu nous rappelles que la dignité ne se mesure pas à la force, ni au rendement. Tu nous rappelles que l’homme est grand… même cloué sur un fauteuil.
Didier Antoine REY
Catholique insignifiant