
Journal d'un catholique libertaire
Qui a pris ses distances vis à vis de l'Eglise, de sa hiérarchie et de son pouvoir
« Si quelqu’un veut être le premier, qu’il soit le dernier de tous et le serviteur de tous. » (Marc 9, 35)

Paragraphe 1 et 2
14 juin 2025
Intruduction ; Dieu voit bien les choses
Introduction
1. Dans notre société moderne (vilain mot pour certains), où les changements sociaux, économiques et culturels se succèdent et s’entremêlent rapidement, de nombreux croyants se sentent de plus en plus déconnectés des institutions religieuses traditionnelles, notamment de l’Église catholique. Cette rupture, qu’elle soit partielle (ceux qui vont à la messe pendant les grandes fêtes) ou complète (ceux qui n’y vont plus du tout, retirés des assemblées et des communautés), s’explique par de multiples facteurs : le comportement doctrinal vis-à-vis du peuple, le décalage entre les enseignements de l’Église et les réalités vécues par des gens ordinaires, ceux qui se sentent jugés, regardés de travers, écartés des discussions et des décisions pastorales, relégués sur les bas-côtés : familles monoparentales ou recomposées, chrétiens divorcés remariés, célibataires sans diplôme universitaire, personnes handicapées, personnes en dépression ou atteintes de maladies mentales, personnes homosexuelles, personnes sous addictions, personnes pauvres, et toute sorte d’insignifiants… et Dieu sait qu’il y en a.
Sans oublier, bien sûr, tous les scandales : exactions, abus sexuels et corporels, manipulations, violences, abus de pouvoir du clergé, mais aussi de laïcs influents, qui font la pluie et le beau temps, se cooptent entre eux et écartent tous les hors-normes, les trublions, les non-conformistes, ceux qui n’ont pas voix au chapitre, rejetés comme des malpropres. Moi-même, j’en ai fait les frais. J’ai connu plusieurs personnes en grande souffrance, traumatisées, leur foi ébranlée.
Cependant, cette distance vis-à-vis de l’institution ne signifie pas nécessairement une perte de foi ou un abandon de la spiritualité chrétienne. Bien au contraire, beaucoup cherchent à nourrir une relation plus personnelle, plus profonde, plus intime avec Dieu, sans les médiations institutionnelles, les rites standardisés qu’ils ne jugent plus pertinents. Dans cette démarche, je vous propose d’explorer comment il est tout à fait possible de vivre pleinement sa foi chrétienne au quotidien, en harmonie, en dehors de la communauté paroissiale ou de vie (qu’elle soit traditionaliste ou charismatique), comment s’imprégner des éléments essentiels de notre spiritualité, en particulier l’Évangile, dans notre sphère privée, malgré les doutes, les distances et les souffrances subies.
Depuis ma conversion à l’âge de vingt ans, j’ai rencontré beaucoup de personnes dans ma vie chrétienne qui éprouvent le besoin de se rapprocher de Dieu sans passer par le cadre institutionnel de l’Église. Cette relation personnelle peut se construire dans le silence de la méditation et de la prière individuelle, en cultivant un dialogue intérieur avec Dieu et notre Seigneur Jésus… eux seuls. Se reconnecter à une foi vécue dans le cœur, qui devient une source de paix et de soutien dans les moments difficiles. La prière, la méditation de pleine conscience à la lumière de l’Évangile m’ont sauvé la vie. Elles nourrissent ma spiritualité intérieure et me permettent de ressentir la présence de Dieu et de son Fils, notre Seigneur Jésus, sans intermédiaires.
Même éloigné des sacrements et des pratiques institutionnelles, il est possible de vivre les valeurs chrétiennes dans notre vie de tous les jours, là où nous sommes, là où nous en sommes. Cela peut se traduire par un engagement envers l’autre, dans sa dignité humaine, en posant des gestes simples de solidarité, de pardon, de bienveillance et de justice, qui incarnent concrètement l’amour du prochain.
En pratiquant la bienveillance, la compassion et la générosité, on incarne les principes évangéliques au quotidien. Cela ne m’empêche pas d’être critique et sévère dans mes propos, quand l’incompréhension devient mépris, quand l’indifférence se transforme en violence silencieuse, quand on blesse ou profite des plus faibles.
Cet engagement devient une manière de vivre ma foi en action, dans un style de vie cohérent avec les enseignements de notre Seigneur Jésus. Les ouvrages de Jacques Loew et de Madeleine Delbrêl m’ont aidé dans le cheminement de ma conversion… sans avoir besoin d’une validation ou d’un imprimatur institutionnel.
Contrairement aux idées reçues, le doute n’est pas une faiblesse de la foi ; c’est un ressenti naturel de la vie spirituelle, surtout après une humiliation ou un rejet subi de la part d’une institution catholique qui m’a conduit à une forte dépression, m’a anéanti et laissé seul face à mes blessures. Le doute devient alors une souffrance insurmontable, une dépression qui envahit chaque pensée, éteint l’espoir et rend les jours lourds d’un vide difficile à nommer.
J’ai compris que le doute pouvait aussi être le point de départ d’une foi plus libre, plus authentique, détachée de la communauté et de l’institution… car trop, c’est trop… mais enracinée dans une quête sincère de sens et de vérité. Dans ma dépression, qui a duré près de deux ans, avec des pensées suicidaires, j’ai pris le temps, dans l’agitation de mon esprit, de m’interroger sur le sens de la vie et de la foi. Cela m’a permis de forger une relation plus profonde avec mon Dieu, grâce à la méditation de pleine conscience. Les périodes de doute sont devenues des occasions de croissance spirituelle, personnelle et intérieure, m’amenant à me redéfinir en tant que disciple du Seigneur Jésus, à approfondir mes convictions réconciliées, à construire une relation plus intime et sincère avec Dieu. Ce ne fut pas simple, je l’avoue, mais ce fut une expérience salutaire et extraordinaire.
Dieu voit bien les choses.
2. Cependant, je reste attentif à ne pas croire ceux qui affirment que Dieu n’accorderait aucune attention, ni n’écouterait les prières de ceux qui ne vont pas à la messe le dimanche ; qu’il enverrait des épreuves, des punitions ou des châtiments aux infidèles, aux blasphémateurs (ceux qui critiquent l’Église). Encore mieux : que seuls les baptisés auraient des privilèges sur les grâces divines. Je ne plaisante pas. J’ai souvent entendu ce genre d’absurdité. Comment Dieu pourrait-il me juger ou me condamner parce que j’ai quitté ma communauté paroissiale et pris mes distances vis-à-vis de l’Église ? Je n’ai aucune crainte.
J’ai subi de l’indifférence, des injustices, des humiliations. Je suis semblable aux Galiléens du temps du Christ : un peuple méprisé par les autorités religieuses et les élites, un peuple de laissés-pour-compte, d’insignifiants, qui veut simplement mettre le Seigneur Jésus au cœur de sa vie.
Non, je ne me suis pas rejeté moi-même, comme l’affirment certains fidèles.Non, ce n’est pas entièrement de ma faute. Ma recherche spirituelle n’a jamais cessé, même s’il y a eu un temps d’arrêt ou de doute.
Si les églises étaient si accueillantes, elles seraient pleines à craquer ! Je ne veux plus vivre ma foi en communauté, ni aller à la messe chaque dimanche. C’est mon choix. Et j’en suis heureux.
Je suis un croyant hors norme, mais je garde mes valeurs et une grande sensibilité. Je ne renie pas mon identité catholique. Le catholicisme fait partie de mon histoire, c’est mon identité depuis l’âge de six mois, et j’en suis fier. Le libertaire que je suis, issu de ma foi catholique, repose sur la conviction profonde que la liberté humaine est un don de Dieu, une responsabilité sacrée inscrite dans son dessein pour toute l’humanité.
Être catholique libertaire, c’est vivre dans une tension créative entre une foi enracinée dans des principes universels et le respect de la conscience individuelle, considérée comme le sanctuaire où Dieu parle à chacun. Cette liberté ne se limite pas à une absence de contraintes ; elle se déploie dans le choix du bien, la recherche de la vérité et la quête d’une vie qui honore l’amour et la justice.
Ma perspective libertaire, nourrie par la doctrine sociale de l’Église, prône une société où l’autonomie personnelle s’allie à la solidarité, un espace où chacun peut exprimer pleinement son potentiel tout en servant le bien commun. Cette vision transcende les antagonismes idéologiques pour célébrer une liberté authentique, éclairée par l’Évangile.
Certes, il existe dans l’Église des femmes et des hommes formidables, des prêtres, des religieux et des religieuses extraordinaires. Mais soyons lucides : le clergé est en déclin, et ce sont les laïcs influents, supérieurs au sein de l’institution, qui prennent le pouvoir sur les subalternes.
Je suis un chrétien (catholique) heureux et libre.
Tout cela ne m’empêche pas de vivre ma foi chez moi. L’essentiel, c’est que l’Évangile reste au cœur de ma vie. Je suis libre de ne plus faire partie d’une communauté paroissiale ou de vie, libre de croire chez moi, libre de m’adresser à Dieu et à notre Seigneur Jésus, dans un édifice ou non, seul dans un monastère, libre de lire l’Évangile et de le méditer dans ma sphère privée ou en pleine nature, libre de penser par moi-même, avec ma propre sensibilité et mes propres émotions, libre d’agir auprès de ma famille, de mes amis, de tous ceux que Dieu a placés sur mon chemin : mon prochain, mais aussi ceux qui sont éloignés de l’Église.
Que nous habitions en ville ou en pleine campagne, je suis convaincu que Dieu et le Seigneur Jésus, à qui je m’adresse chaque jour dans le secret, ne me jugent pas, mais m’écoutent et me guident. C’est une certitude.
Je remets directement mes péchés au Seigneur Jésus. Et il faut le dire : une grande majorité des fidèles ne se confesse plus. Ce n’est pas un acte d’insubordination envers l’Église catholique. Notre Seigneur me pardonne ! Je ne veux plus faire partie des communautés qui, au nom de Dieu ou de l’Esprit-Saint, prétendent me dicter exactement ce que je dois faire, selon leurs intérêts, sous peine d’exclusion… voire de la damnation éternelle.
Dieu voit bien les choses. Il sait précisément ce que je ressens au plus profond de mon être lorsque je m’adresse à lui dans ma chambre, celle qui est la plus retirée. Le Seigneur Jésus dit, en Matthieu 6, 6 : « Quand tu pries, retire-toi dans ta pièce la plus retirée, ferme la porte et prie ton Père qui est présent dans le secret ; ton Père qui voit dans le secret te le rendra. »
Depuis que j’ai découvert les bienfaits de la méditation de pleine conscience, mes prières sont devenues plus calmes, profondes et reposantes. J’arrive à maîtriser mon esprit vagabond.
GARDONS LA FOI ! Ayons confiance. Dieu a envoyé son Fils, le Seigneur Jésus, pour nous sauver. Il est venu partager notre condition humaine et en comprendre chaque nuance, y compris celles de notre propre vie… parfois chaotique. Il est proche de nous. Il ne nous abandonnera jamais. Il est notre guide, notre joie, celui qui nous conduit à Dieu, notre Père.
Les hommes racontent ce qu’ils veulent. Le peuple n’est plus dupe : les craintes et les peurs ne fonctionnent plus. Jésus et Dieu seuls peuvent nous comprendre et nous juger. Mais rassurez-vous : il ne faut plus croire en un Dieu vengeur, car l’amour a remplacé la peur, et la miséricorde a triomphé de la colère. Les hommes n’ont plus la mainmise sur nous.
Personne ne peut aujourd’hui prétendre savoir ce que pensent notre Seigneur Jésus et Dieu notre Père. Personne ne peut prédire ni prononcer de châtiments en leur nom. Encore moins punir. Personne ne peut affirmer que les maladies mentales (autisme, schizophrénie, etc.) sont des possessions démoniaques. Personne ne peut prétendre que les pandémies (la peste, le choléra, les grippes, la tuberculose, le VIH-Sida, la COVID-19) sont des punitions de Dieu. Idem pour les dérèglements climatiques ou les catastrophes naturelles. Ces temps sont révolus.
C’est une libération. Une révolution de l’amour de Dieu. Cet amour dépasse toutes les doctrines et tous les dogmes. Dieu nous demande simplement de partager son amour avec chaque homme et chaque femme, surtout ceux qui sont les plus éloignés de l’Église.
Notre Seigneur Jésus nous aime plus que tout. Il ne fait aucune distinction. Il est notre Berger, celui qui nous conduit sur le chemin du Royaume. Son amour est une force immense, même pour une vie imparfaite et médiocre comme la nôtre. Si la porte de l’Église est fermée, celle du cœur de Jésus reste toujours ouverte, sans barrière ni barricade. Jésus nous le rappelle dans Luc 11, 9-10 : « Demandez et l’on vous donnera ; cherchez et vous trouverez ; frappez et l’on vous ouvrira. Car quiconque demande reçoit ; qui cherche trouve ; et à celui qui frappe, on ouvrira. »
Nous n’avons qu’un seul guide : le Seigneur Jésus-Christ, qu’un seul intercesseur. Même si vous avez été blessés et éloignés de votre foi, pour retrouver le bonheur en tant que chrétiens, il faut d’abord rechercher votre paix intérieure, apaiser votre esprit, et vous libérer des contraintes et des craintes. C’est une étape essentielle pour reconquérir un esprit libre, serein et tranquille. C’est à la portée de chacun.
Pour moi, en tant que croyant, ma relation avec Dieu le Père et le Seigneur Jésus, son Fils bien-aimé, ne pourra jamais être harmonieuse si mon esprit reste tourmenté par le stress et l’angoisse. D’où l’importance de ma rencontre avec la méditation de pleine conscience, qui m’a offert un véritable repos intérieur.
En fin de compte, ma relation avec Dieu et notre Seigneur Jésus dépasse les cadres humains et institutionnels. Elle repose sur une connexion personnelle, intime, sincère, et sur l’amour profond que je ressens pour eux. Mon chemin spirituel est libre, porté par la foi et guidé par les enseignements de l’Évangile. L’Église, avec ses richesses et ses failles, appartient à mon histoire et à mon identité. Mais je crois fermement que Dieu ne se limite pas à des murs ou à des dogmes. Son amour est universel, inconditionnel, et s’adresse à chacun, là où il se trouve.
Quelles que soient les épreuves, je reste en paix et confiant : je suis certain que mon guide, mon Berger, marche à mes côtés, m’écoute et me pardonne. C’est lui qui m’ouvre la porte du Royaume, sans contrainte, sans crainte, avec la puissance infinie de son amour.
A SUIVRE...
(1) Jacques Loew (1908–1999) était un prêtre dominicain français, théologien et figure majeure du mouvement des prêtres ouvriers. Madeleine Delbrêl (1904–1964) était une figure spirituelle française majeure : assistante sociale, mystique, poétesse et missionnaire au sein du catholicisme laïc.